Tout a été tenté. Les coups de gueule dans les médias, les manifestations, les sit-in devant le ministère de la Santé… Alors c’est la dernière tentative pour trouver une solution, un “ultime recours”. Dans un communiqué furibard, Ipadecc (Intégration des praticien·nes à diplôme étranger engagé·es contre la crise), l’une des principales associations représentatives des praticien·nes à diplôme hors Union européenne (Padhue), menace les autorités d’un mouvement de grève de la faim.
Ces médecins devenu·es indispensables dans nombre d’hôpitaux français représenteraient selon les chiffres des syndicats 8% des praticien·nes hospitalier·es en France, et jusqu’à 30% dans certains départements, comme le Val-d’Oise. Mais malgré leur rôle, nombre d’entre elleux travaillent dans des conditions précaires, semblables à celles d’internes, alors même qu’iels sont diplômé·es dans leur pays. Le parcours de reconnaissance, très complexe, laisse beaucoup de ces Padhue sur le bord de la route.
Si le gouvernement compte simplifier les évaluations et la reconnaissance du diplôme, nombre des praticien·nes présent·es depuis des années dans les couloirs des hôpitaux français dans des conditions précaires, ne pourront plus travailler. Car leur diplôme n’est pas reconnu. “Pour beaucoup, on est arrivés pendant la crise du Covid, et on va se débarrasser de mes collègues comme ça ?”, s’émeut le médecin diabétologue à l’hôpital Max Fourestier de Nanterre, en région parisienne. “Si la volonté est de valider nos Padhue aujourd’hui, pourquoi maintenir à la fois une voie interne et externe avec un quota, tout en continuant à faire appel à des Padhue étranger·es sans régler la situation de celles et ceux qui soutiennent déjà nos hôpitaux ?” s’interroge le président d’Ipadecc.
Car tous les ans, c’est le nombre de postes de reconnaissance ouverts par le jury qui attise la colère des organisations représentatives des Padhue. En 2024, seuls 3 500 praticien·nes à diplôme hors UE avaient été admis·es en parcours de reconnaissance, pour 20 000 candidat·es : moins qu’annoncé. En 2023, 2 700 postes avaient été ouverts, toujours pour 20 000 candidat·es. Si chaque année le jury prétexte un niveau trop faible pour baisser le nombre de places ouvertes, de nombreux médecins, y compris chef·fes de services, le dénoncent, voyant certain·es de leurs praticien·nes à diplômes hors Union européenne recalé·es sans pourtant y avoir noté chez elleux un quelconque manque de niveau académique ou professionnel.
Que faire alors de ces médecins qui exercent déjà, mais qui n’ont pas pu rentrer dans ce parcours du combattant de la reconnaissance ? Seront-iels purement et simplement remercié·es, même pour celleux qui travaillent depuis des années dans les hôpitaux publics français, comme le craint Ipadecc ? Le ministre de la Santé, Yannick Neuder, aurait émis l’idée de rendre possible une reconnaissance par les chef·fes de service, au fait des compétences de leurs équipes, mais rien n’est encore fait, et nombre d’initiatives concernant les Padhue ont été, depuis des années, mises au placard au gré des remaniements. Alors, si aucune solution n’est présentée aux organisations syndicales le 4 mars par le ministère de la Santé, Abdelhalim Bensaidi compte bien entamer sa grève de la faim “en ultime recours”.