L’adage est bien connu : « mieux vaut prévenir que guérir ». Pourtant, pendant mes études de médecine, il m’a plus été appris à poser des diagnostics et à traiter les patient·es qu’à aider les personnes à prendre soin de leur santé. Mais cela, je ne l’ai compris que pendant mon premier semestre d’internat, en neurologie vasculaire.
Je travaillais alors dans un grand centre hospitalier, situé dans une des régions les plus pauvres de France. Un jour, une patiente proche de la soixantaine est transférée dans notre service pour hémiplégie massive, due à un AVC ischémique. Nous étions à presque 24h du début des symptômes et malheureusement, il était déjà trop tard pour administrer les traitements efficaces. Dans la prise en charge d’un AVC, en effet, chaque minute compte.
Malheureusement, la patiente ne le savait pas, et son mari non plus. En interrogeant ce dernier, sa femme avait brutalement perdu l’usage de la moitié de son corps après le dîner. Leur réflexe n’a cependant pas été d’appeler le Samu, car ils pensaient que ça irait mieux le lendemain après une bonne nuit de sommeil. Devant l’absence d’amélioration au réveil, là seulement est arrivé le déclic d’aller consulter.
« C’est à ce moment précis que j’ai réalisé que la médecine avait manqué une étape cruciale »
En questionnant davantage son époux, je m’aperçois que la patiente cumule les facteurs de risque cardio-vasculaires, puisqu’en dehors de son âge et de son surpoids, elle a également une consommation d’alcool quotidienne et un tabagisme important. Elle n’est pas non plus suivie pour son hypertension artérielle ni pour sa dyslipidémie. Et comme son mari me le précise : « un verre de vin, ce n’est pas vraiment de l’alcool ».
Vraisemblablement, ils n’étaient ni sensibilisés aux facteurs de risques vasculaires, ni aux symptômes devant faire suspecter un AVC. Être correctement informée aurait peut être permis à la patiente d’éviter cet évènement, ou tout du moins d’éviter un handicap majeur et une rééducation éprouvante.
C’est à ce moment précis que j’ai réalisé que la médecine avait manqué une étape cruciale, celle de l’information et de la prévention – en particulier auprès des milieux les plus défavorisés.
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